L'ONDINE DE MORIMONT(1)

Publié le par Patricia Gaillard

photo P.Gaillard

L’ONDINE DE MORIMONT (1)

La belle Mathilde avait le cœur tout chargé de tristesse. Son chevalier Peter guerroyait au lointain alors que son ventre était rond d’un enfant à venir. Elle allait chaque jour s’asseoir près d’une source qui courait sur leurs terres, à l’ombre des noisetiers. Son eau était si pure et si argentée qu’elle semblait communiquer sa paix tranquille à qui s’arrêtait là. Un jour, en arrivant, Mathilde y trouva une jeune dame, souriante et douce qui était vêtue de dentelles vertes et blanches qui rappelaient les lichens, les feuilles, les écumes mousseuses des rivières et les givres pointus des forêts d’hiver. Mathilde trouva cette femme étonnante et de fait, elle l’était, car elle prononça cette phrase avant de disparaître dans le miroir de l’eau. 
« Je suis l’ondine, gardienne de cette source, fais-moi marraine de l’enfant que tu portes. »

Mathilde, après un instant de surprise, rentra au château, éblouie par cette courte mais somptueuse visite et bien décidée à dédier son enfant à l’ondine. Elle accoucha bientôt, souffrit peu, l’enfant était une fille, bien rose et les yeux bleus. L’accoucheuse, qui n’avait jamais œuvré si vite, se retira, surprise. Une servante posa la petite au berceau, tout recouvert de lin fin et bien blanc.
Mathilde appela sa chère fille comme elle-même.
Plus tard, dans la pénombre brune de la chambre, la mère, les yeux fermés, écoutait le petit souffle régulier de son enfant. Soudain une main prit la sienne, c’était l’ondine, avec ce même sourire, cette même douceur, cette même robe aussi. Elle regarda la petite, sourit et posa son présent.
C’était une pomme.
« Tu lui donneras cette pomme quand elle sera grande, sache qu’elle comblera trois de ses vœux. »
À nouveau elle disparut, aussi soudainement que la première fois.
À quelques temps de là un messager arriva au château, il apportait des nouvelles du chevalier qui se mourait, là-bas, mortellement blessé sur un champ de bataille.
Mathilde, foudroyée, tomba morte aussitôt.

Pourtant Peter ne mourut pas. On frôle parfois la mort de très près sans la suivre. « Ce n’était pas son heure » dit-on alors de celui qui revient du singulier voyage… Peter fit donc à son retour la connaissance de son enfant, cette petite orpheline blonde que les nourrices entouraient de leur mieux. Il découvrit aussi la poignante solitude du deuil. Quant à la pomme, elle dormait secrètement dans un coffre, au milieu des affaires de l’épouse disparue. Le fruit était un peu moins luisant, un peu moins ferme, mais il n’avait rien perdu de sa magie…

À bientôt pour la suite !

La gaillarde conteuse…
  

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