LA FEMME SQUELETTE - conte inuit - version de Patricia Gaillard - 4ème et dernière partie
LA FEMME SQUELETTE - conte inuit - version de Patricia Gaillard
4ème et dernière partie
Elle n'a rien vu, rien entendu, rien pensé bien sûr, elle n'avait que ses os, mais elle a ressenti quelque chose, comme un battement, dans la profondeur de ses os. Elle s'est mise à ramper jusqu'à l'homme et elle a posé ses phalanges sur sa poitrine. Elle a senti un battement dans ses os, elle a ouvert la poitrine avec ses doigts coupants et elle a sorti le coeur qui battait, comme un tambour. Son tambour, où l'avait-elle laissé ? Au fond de la mer ? Elle a pris ce coeur chaud, humide, dans ses deux mains d'os et elle s’est levée, s'est mise à danser, à danser, à danser...
À danser, à danser, à danser...
Pendant qu'elle dansait sa chair doucement s'est recomposée, des yeux lui sont venus et enfin elle a vu ce coeur, elle a entendu son battement et elle l'a senti dans ses doigts, elle l'a senti dans tout son corps comme son propre coeur, son tambour, qui battait et elle a su que ce coeur dans ses mains n'était pas le sien. Alors elle s'est mise à genoux, a remis le coeur dans la poitrine ouverte de l'homme. La femme s'est étendue contre le corps de l'homme qui se réveillait...
On dit qu'ils ont été heureux longtemps, qu'ils sont descendus souvent tout au fond de la mer, qu'ils sont montés souvent dans les étoiles du septième ciel, qu'ils se sont donné de la chair toute leur vie. Et on dit aussi que quand son tambour à elle s'est tu, son tambour à lui s'est tu aussi...
Au revoir, chers passants, maintenant je vous en ai dit assez, je vais me taire, mais permettez que je vous embrasse...
Patricia