Les Histoires du Lundi - 11

Publié le par Patricia Gaillard

j'avais soigneusement préparé hier, très tôt, l'histoire du Lundi.
Mais, fidèle à ma distraction, j'ai tout bonnement oublié de la poster ! 

La voici donc ce Mardi  😄
 

LE TRESOR DE MOLAY
 

Un trésor est caché au ventre de sa terre natale par Jacques de Molay, né à Molay vers 1240. Dernier grand maître de l’ordre des Templiers, ordre fondé en 1118 par neuf  moines-soldats qui offrirent leur protection aux croisés sur les routes d’Orient. Certains disent que ces neufs espéraient trouver l’arche d’alliance dans les souterrains du temple de Salomon.

Jacques de Molay et Geoffroy De Charnay, ont été brûlés vifs en mars 1314, après un jugement cruel. Leur mort marqua la fin de l’ordre des Templiers qui devint alors un mythe dans l’esprit d’occident.

Vous le savez, je ne vais pas ici développer les détails historiques, qui sont l’affaire d’éminents spécialistes qui en savent infiniment plus long que moi. Ce qui me parle ici c’est la part troublante de l’affaire. La part mystérieuse.

Jacques de Molay a-t-il pressenti cette tragique fin des templiers ? A-t-il su que leur trésor était si convoité et que le soupçon terrible d’horribles pratiques pesait sur l’ordre ? A-t-il déposé dans la terre de Molay quelques traces précieuses de ce qui fut leur force et y sont-elles encore ? Nul ne sait cela, mais qui pourrait vraiment affirmer le contraire ?

Le mystère demeure. Mais il en est un autre et de loin plus troublant…

En ce jour de mars 1314, près du Pont-neuf, à Paris, sur l’Ile aux joncs, Jacques de Molay et Geoffroy de Charnay sont amenés sur le bûcher. La foule est immense. On voit de loin la croix des templiers, couleur de sang, qui se détache sur la toile des longues robes blanches. Le pape-inquisiteur et le roi-juge sont assis, persécuteurs impassibles devant le crime qui se déroule.

Le bourreau lance la flamme. Les brindilles s’en emparent, s’entortillent, soudées par trop de chaleur puis elles se recroquevillent comme des vers. Les flammes s’allongent, gagnent l’entrecroisement soigneux des bûches sèches qu’elles lèchent, langues d’or vermeil, langues vivantes, grondantes, dévorantes jusqu’à la mort. Les volutes des fumées commencent à cacher, par instants, les visages. Les secondes qui coulent sont des secondes de terreur inexprimable pour ces deux proies liées comme viande. C’est alors que Jacques, rassemblant dans sa voix toute cette belle énergie humaine dont il disposait encore et pour si peu de temps, clama des paroles tonnantes, visionnaires, inoubliables. Elles s’incrustèrent dans l’air tout autour comme si elles y avaient été enchâssées pour toujours. Ces paroles prédisaient la mort et du pape et du roi, avec une conviction qui fit frémir tous ceux qui étaient là.

Puis le feu gagna tout. Le brasier fut énorme. Mais plus énorme encore fut cette voix du seuil. Comme Jacques l’avait prédit, le pape mourut d’abord et puis le roi ensuite. Voilà donc ce mystère encore entier sous nos regards, sept siècles plus tard.

Rêvons, ami, devant le trésor de Molay, introuvable, invisible et beau, et devant la magie qui nourrit encore, malgré l’empilement du temps, nos désirs de merveilles. Puis-je glisser un secret à vos oreilles ? On me l’a confié et très peu le connaissent. Mais Molay est du Jura, donc il est des vôtres. Aussi, écoutez bien cette rare pièce, qui manque à tout récit…

 

Dans cette même année de 1314, le pape meurt en avril et le roi en novembre. Dans sa dernière nuit, chacun d’eux fit ce même rêve. Il marchait d’un pas lourd et montait au bûcher. Là, de vieilles cendres grises et des charbons très noirs faisaient autour un muet et funeste paysage. A leurs pieds, sans le moindre accroc ni une seule salissure, deux robes blanches étaient pliées, comme ces linceuls immaculés qui nous habillent pour le dernier chemin… mais sur celles-ci la marque rouge, rouge-passion, rouge-sang, rouge-vie, des chevaliers du temple.

Ces rêveurs condamnés ont tremblé en les enfilant. Ils ne sont partis sans, ni l’un, ni l’autre,

Et tout est dit.


Patricia Gaillard - Contes et Légendes du Jura - éditions De Borée - 

 

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