HIVER
HIVER
Il me semble l'avoir déjà dit ici en d'autres temps, j'aime l'hiver. Quand je vois le givre irisé sur l'herbe, tôt le matin, je ressens une espèce de transcendance. Mon enfance alsacienne y est probablement pour quelque chose. Nous dormions,ma soeur Gisèle et moi, dans une chambre sans chauffage - en ce temps-là les chambres étaient ainsi - et l'on sait la rigueur des vieux hivers alsaciens. Nous nous glissions le soir, sous le gros édredon de plumes, où ma mère avait pris soin de placer une brique chauffée longtemps sur l'unique poêle. Cette sorte de bouillotte rendait le coucher bien plus agréable et nous permettait de nous endormir délicieusement. On redécouvre actuellement les bienfaits d'une chambre froide sur la qualité du sommeil, nous n'étions donc pas si mal loties...
Au matin, quand le gros réveil sonnait brusquement à nos petites oreilles, je filais, dans ma petite chemise de nuit, pour regarder, fascinée, les belles arabesques de glace que le grand froid avait lentement dessinées, à l'intérieur des vitres de la fenêtre ! Chaque matin le dessin était autre et je vivais cela comme une surprise et un cadeau. Ai-je jamais vu quelque chose de plus beau que cet art, mariage entre la nuit et l'hiver. J'en ai conservé un amour du gel, sous toutes ses formes.
Je vais donc, tous les deux ou trois jours, venir ici vous raconter un conte où le gel a une belle place. Ces récits seront alsaciens, russes, sibériens, danois, en tout cas du Nord, car là-bas le gel règne souvent. En russie, on dit qu'il est roi, qu'il galope durant les longues nuits d'hiver sur un cheval blanc, qu'il porte couronne blanche et manteau blanc... vous imaginez ?
Allez, je me fais conteuse du gel, et je reviens...
À demain pour entamer ces récits glacés qui réchauffent !