MENSONGE ET VÉRITÉ 3ème partie

Publié le par Patricia

MENSONGE ET VÉRITÉ 3ème partie
Conte traditionnel
Version de Patricia Gaillard

gravure collection personnelle

...Mensonge, qui était prévoyant et qui connaissait les besoins de ce corps qu’il occupait, sortit de son manteau une miche de pain et un vrai saucisson. Il prit place sur une large pierre plate et moussue et cassa tranquillement la croûte.

La vérité, naïve, qui n’avait rien prévu, ressentait douloureusement la faim qui tenaillait ce corps qu’elle avait emprunté. 
« Mensonge, je t’en prie, donne-moi un peu de ton pain. »

« Je veux bien, dit l’autre, mais que me donnes-tu en échange ?

« Ce que tu veux.

« Alors donne-moi un de tes yeux. »

Mais diable, dans les visages qu’ils avaient, un œil sur deux c’était beaucoup, c’était carrément la moitié ! Mais ventre qui a faim n’a pas tendance à réfléchir. Vérité accepta. Mensonge lui extirpa un œil et envoya un bout de pain de la même taille que la mirette, ce qui n’est pas bien gros. Vérité se trouva aussi affamée après qu’avant, elle avait pourtant payé cher ce festin minuscule. Mensonge lui proposa de faire encore le même échange, au même prix, alors elle donna son deuxième œil. Il l’arracha, avec la pointe brillante de l’opinel graissé de saucisson, jeta à l’aveugle une miette de pain et s’en alla tout seul, les deux yeux dans ses poches.

Vérité, à quatre pattes, trouvant son bout de nourriture, s'en délecta, ce qui fut très vite fait. Puis elle s’en alla, trébuchant sur chaque pierre, chaque touffe d’herbe, chaque racine crochue, jusqu’à se laisser tomber, découragée, anéantie. C’est alors qu’une espèce de force bienveillante la releva, lui prit la main, la conduisit sur le sentier, l’assit près d’une source qu’on entendait chanter.

« Bois cette eau, lave tes yeux, et quand ton regard sera à nouveau vivant, monte sur ce chêne, qui est juste au-dessus de toi et écoute attentivement les paroles des êtres malfaisants qui errent par ici, dans les ténèbres… » Sur ces paroles énigmatiques, la force se retira. Vérité était seule. Elle but à même la source et lava son visage à l’eau miraculeuse. Des yeux lui repoussèrent qui s’ouvrirent à nouveau. Alors, voyant qu’elle gagnait tout à suivre les instructions reçues, elle se tint cachée dans les fourrés d’épines, près de l’arbre et de l’eau, grappillant leurs baies brillantes, rubis, grenat. Bien plus tard dans la nuit, de grands oiseaux très noirs, avec de larges ailes, se posèrent par dizaines sur les branches feuillues des arbres d’alentour. Ils parlaient notre langage et leurs conversations donnaient des frissons crus. Ils racontaient les mauvais sorts qu’ils avaient jetés avec délice à des femmes, des hommes et même des petits enfants, des victimes nombreuses, choisies au hasard et dont les tourments les avaient régalés. L’un d’eux était très fier d’avoir ainsi atteint une princesse de ces fines tortures. La pauvre, d’ailleurs, devait à cette heure se mourir lentement. Mais dans leurs bruyants et noirs bavardages, Vérité les entendit évoquer un très précieux secret : « Si elles savaient, toutes nos malheureuses victimes, qu’au pied de ce chêne coule une source vénérable qui a le don de guérir tous les maux ! Mais heureusement, nous seuls la connaissons !.........

à demain !

 

 

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