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Le jardin du 6 Juin

Publié le par Patricia Gaillard

Ici c'est le jardin des contes et de la musique et ça ne passe pas inaperçu. Tout est de pierre, de terre et de bois. Les fenêtres de la maison prennent l'air, eh bien ça nous permet d'être un peu dehors l'hiver, quand le froid nous tient à l'intérieur. C'est une maison qui respire.
Ta ta ta, allons, on parlera de l'hiver en hiver !

Un pied de tomate dans sa serre porte des fruits gros comme des balles de tennis. Ils seront jaunes d'or et deviendront la première salade de tomates. Pas question ici de consommer la moindre tomate du commerce, même en hiver. Aussi cette première salade, agrémentée d'une fine sauce faite de vinaigre balsamique, d'huile de colza et d'ail nouveau, sera sacrée, je le dis en pesant ce mot. Semer les légumes, puis les voir grandir, prendre couleur, mûrir, est un accompagnement de la nourriture que chacun devrait pouvoir faire, tant il est bénéfique pour le corps et pour l'esprit. Vous allez dire "que vient faire ici l'esprit ?"
Vous n'imaginez pas à quel point se nourrir concerne l'esprit
Ce n'est pas pour rien que le paganisme attribuait des esprits aux arbres et aux plantes.
Mais nous aurons l'occasion d'y revenir
hé hé, vous me connaissez !

à demain

la gaillarde conteuse...

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Le jardin du 5 Juin

Publié le par Patricia Gaillard

Ça y est, quelques jours sans vigilance et les doryphores se sont installés, et bien installés ! Criblées de larves rouges, grignotées de partout, certaines feuilles qui avaient été si belles ont perdu tout leur charme. L'abeille du lieu - entendez mon époux - met son chapeau, prend un bocal et se met à les cueillir tous, pestant et grommelant entre les plants. Puis, après être passé me montrer sa récolte dans l'espoir de me voir compatir avec des "oh, ce n'est pas possible", ils les jette sans pitié dans la rivière. Hou, c'est cruel, mais je me garde de faire un commentaire qui tomberait mal. Comment défendre ces bestioles sans être indigne ? Le moment est grave... même cet homme de paix perd parfois patience. C'est la guerre au potager ! 
En face de ce champ de bataille, au-delà de l'allée, les céleris-branches et raves s'épanouissent de jour en jour. Ils sont si beaux qu'avec une pointe d'imagination on en aurait le goût sous la langue. Près d'eux poussent les betteraves rouges. Les tiges raides et les nervures de leurs feuilles sont rouge bordeaux satiné. Les griottes murissent, s'arrondissent, la livèche va fleurir, les pêches grossissent... il y a tout de même un côté paix dans ce jardin !

 

j'aime vous inviter dans mes promenades

à demain !

la gaillarde conteuse... 

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Jardin du 4 Juin

Publié le par Patricia Gaillard

Au jardin, mon époux est une abeille. Il coupe, taille, soigne, évalue, récolte, nettoie, recouvre, combat, sauve. Sa charge est grande et il la porte consciencieusement, sans compter sa peine, comme le font ces belles ouvrières. C'est lui le maître du jardin. Savez-vous ce que signifie être maître du jardin ?
L'histoire qui suit va vous le dire...

 

Un roi avait rapporté, d'un voyage lointain, un rosier dont on lui avait dit :
"celui qui saura le faire fleurir atteindra l'immortalité."
Il était revenu en son château, avait confié l'arbuste à ses jardiniers et les chargea de lui prodiguer les meilleurs soins. Le roi rendait visite chaque jour au rosier et au premier printemps il attendit, ému, la floraison.

Toute la saison se déroula, mais au rosier ne vint aucune rose.

Le roi chassa donc les jardiniers incapables et lança une annonce à grands bruit de tambour. Le salaire était de taille, plusieurs hommes se présentèrent, prétendant posséder la vraie science des jardins. Il choisit le plus vieux, se disant qu'il tenait là, forcément, le plus sage.

Le printemps arriva, se déroula, mais au rosier ne vint aucune rose.

De colère le roi fit couper la tête du jardinier.

Le drame ne découragea pas grand-monde et on essaya ainsi sept fameux jardiniers.

Durant sept années cependant on ne vit pas la moindre rose et chaque année une tête roulait au parvis du château.

Un matin d'hiver, dans le voile cristallin du gel qui enrobait le jardin, on entendit résonner la cloche du château. Un homme très jeune, doux et souriant, à qui on ouvrit la porte, disait être un jardinier véritable. Sa mine n'était guère celle d'un magicien, mais le roi, découragé, accepta malgré tout ce nouvel horticulteur. Il lui montra les jardins, le rosier et lui rappela, tout de même, les sept téméraires qui avaient péri de trop de suffisance. L'homme demeura serein devant cette menace, il fut donc engagé.

Dès le lendemain il se rendit près du rosier, mais ne lui donna pas de soins, ne le toucha même pas. Je dois vous préciser, chers visiteurs, qu'un jardinier véritable est celui qui sait parler avec les arbres. Il se contenta de se mettre à genoux, pour être à la hauteur de l'arbuste et se pencha pour lui parler, avec amour, comme le ferait un frère.
- "Dis-moi, rosier, quel mal te ronge pour que tu ne puisses ainsi fleurir comme tu devrais le faire pour être véritablement toi-même ? »
Je ne vais pas vous dire que le rosier lui répondit avec des mots - dont on sait bien qu’ils ne sont pas le langage des plantes - cependant le rosier répondit comme répondent les rosiers et la terre de son pied, dégelée par un joli soleil, bougea un peu, fit un léger monticule et un ver blanc, gros et aveugle, s'extirpa lentement du sol. Le garçon le tira, sans lui faire de mal, mais c’est là qu’un rapace, tombé du ciel, fondit sur la bête et l’emporta avec lui. Le souci de ce rosier semblait à présent dissipé par la disparition de l’étrange animal.

Le jeune homme prodigua des soins attentifs à celui qui retenait ainsi depuis longtemps sa vigueur et sa force. L'arbuste devint en peu de temps aussi beau que peut l'être un rosier. Ses feuilles vernissées, d'un beau vert rosé, accueillirent bientôt au milieu d'elles des boutons allongés et ventrus, d'abord fermés, puis entrouverts, montrant des pétales encore sagement pliés. Un matin, le jour posa sa rosée sur une dizaine de fleurs, rose d'aube et simplement magnifiques. Le roi, prévenu, embrassa de grande joie notre bon jardinier. Tout le jour on fit fête, le roi était heureux. Il faut dire que l'immortalité n'est pas un bienfait ordinaire...

Quelques semaines plus tard le roi tomba si malade qu'on parlait d'appeler le prêtre près de lui. Le souverain, consterné, fit appeler le jardinier et lui murmura dans un souffle :

- "Dis-moi, mon garçon, toi qui a su faire fleurir ce fameux rosier, peut-être peux-tu dire pourquoi je meurs, quand je devais être éternel ?

-  Sire le roi, vous avez mal compris, je crois, le message qu'on disait, ce n'est pas celui qui possède le rosier qui sera immortel, mais bien celui qui le fait fleurir..."

Le roi eut juste le temps d'ouvrir deux yeux consternés, que la mort le prit là, sans tact et sans patience, comme elle fait très souvent et sans distinguer les gueux des rois.

(Version de Patricia Gaillard)

 

je vous laisse aux méditations que réveille ce récit...

à bientôt

la gaillarde conteuse...

 

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Le jardin du 3 Juin

Publié le par Patricia Gaillard

Permettez-moi de revenir un instant à cette sauge dont je parlais l'autre jour. Il ne faudrait pas passer trop vite sur cette plante vertueuse entre toutes, chargée d'histoires et de légendes. J'en avais consigné quelques-unes dans mon gros ouvrage de contes et légendes du Jura, où j'évoque le château de la Sauge, à saint-Lamain. 

Ce château fut construit en mille cinq cent trente, pour Blaise de Visemal, qui y fit planter un riche jardin. Il était un peu médecin et y avait fait faire un Herbularius1. Une sauge bien sûr s’y trouvait, qui a peut-être donné son nom à ce château.

La sauge s’appelait salvare (sauver) chez les romains, puis salviam au temps de Charlemagne, puis sauge au treizième siècle, où un médecin du moyen-âge, de l’école de Salerne, disait à ses élèves…

« Pourquoi faut-il que l’homme meure,

Puisqu’en son jardin à toute heure

Il a de la sauge planté ? »

Elle s’appelle aussi … thé de France, thé de Grèce, herbe sacrée et toute bonne

Sa réputation est de préserver la santé et de prolonger la vie.

On dit depuis longtemps et on le dit encore…

 « Qui a la sauge en son jardin vit cent sept ans ! »

 

Déjà connue dans l’Egypte antique, elle était réputée donner la fertilité aux femmes. Chez les grecs de l’antiquité Pline l’Ancien prétendait qu’elle améliorait la mémoire. Les chinois l’échangeaient contre leurs thés les plus précieux. Les Grecs, les Romains et les Arabes s’en servaient en compresse contre les morsures de serpent. A l’époque des grandes pestes, elle entrait dans le vinaigre des quatre voleurs. Ces quatre voleurs de Toulouse avaient étonné leurs juges, car ils avaient détroussé de nombreux  cadavres morts de la peste, sans en prendre la maladie. Ils ont révélé la recette que voici…

3 pintes de vinaigre fort. De chacune une poignée : absinthe, reine des prés, baies de genièvre, marjolaine sauvage, sauge. Cinquante clous de girofle. 2 onces de racines d’inula campana. 2 onces d’angélique. 2 onces de romarin. 2 onces de marrube. 3 grammes de camphre.

Cette révélation leur a valu d’être pendus plutôt que brûlés vifs !

Au dix-septième, Louis XIV en avait fait sa tisane habituelle.

Au dix-huitième, les marseillais menacés par la peste, utilisèrent cette recette pour en faire une panacée, vendue en droguerie.

Au dix-neuvième siècle, la recette devint un médicament officiel, conseillé à tous ceux qui s’occupaient de malades. On faisait aussi brûler la sauge dans les lieux de soins, pour  assainir l’atmosphère infectée. La plante était considérée comme un gage de longévité, voire d’immortalité. Les amérindiens, à l’occasion de rites chamaniques, se servent de la sauge blanche comme encens et de la sauge divinatoire comme hallucinogène.

Sachez qu’en Franche-Comté, la sauge est réputée soigner les gens autant que les bêtes, quand elle est prise en boisson, qu’elle guérit les blessures en cataplasme. Offerte en bouquet à un amoureux dont la promise en épouse un autre, elle cicatrise les maux et les tourments de son cœur blessé.

Et ce proverbe comtois se pose en conclusion :

Quand le bouquet de sauge périt, la maison défaillit.

Et je terminerai par cette étrange recette…

Quand un certain insecte pique la tige de la sauge, on y voit apparaître des galles parfaitement comestibles, qu’autrefois on conservait dans du miel… !

 

Je suis contente, vous voici renseignés sur la sauge, ouf, j'avais peur de vous avoir mis à l'écart de ce nécessaire savoir. Si vous avez de la sauge, vous savez à présent son usage, et si vous n'en avez pas, plantez-en vite, si vous voulez durer... 107 ans ! ;-)


que la journée vous soit très douce !

la gaillarde conteuse

 

 

 

1 Herbularius : au moyen-âge, plate-bande de plantes médicinales, aromatiques et condimentaires.

 

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